Dalle funéraire

 Cette dalle funéraire gravée est datée du XVIème siècle. Elle représente Loys de Billy et Marie de Brichanteau.

Cette dalle pavait la nef de l’église Saint Denis de Prunay-le-Gillon. En 1876 lors du dépavage de la nef, elle a été brisée et les fragments ont été rassemblés avec du mortier à base de plâtre. Elle a été repositionnée dans cet état dans l’entrée de l’église, le long d’un mur. 

Loys de Billy est né vers 1482 et décédé en 1556. Il fut Baron de Courville, Seigneur de Prunay-Le-Gillon et de Vertron, Lieutenant de la Compagnie des Gendarmes du Maréchal de Brissac et Gouverneur de Guise, chevalier de l’ordre du Roy. Il est le fils de Perceval de Billy, Seigneur de Prunay-le-Gillon et d’Ivort et de Louise de Vieuxpont, Dame de Courville. Il épouse Marie de Brichanteau, fille de Louis, Seigneur de Brichanteau et de Marie de Veres, Dame de Beauvais-Nangis. Marie de Brichanteau avait par ailleurs épousé, en premières noces Gilles d’Anglure écuyer du roy.

Louis de Billy eut au moins 11 enfants avec Marie de Brichanteau. Parmi eux, des chevaliers, évêques abbés ou abbesses…

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Caractéristiques : 

Dalle funéraire, hauteur 2,05 m, largeur avant restauration 1,17 m (dont parties refaites à base de plâtre 2 cm environ) après restauration 1,15 m, profondeur 0,16 m. Poids avant restauration (pierre seule, sans les réfections anciennes au plâtre) : plâtre) : 802 kg ; poids total après restauration, avec les comblements : 814 kg.

Iconographie

Loys de Billy est représenté en chevalier d’âge mûr (on note des rides sur son front), vêtu d’un haubert de mailles dissimulé en partie par son surcot arborant les armoiries de sa maison, armoiries que l’on peut retrouver en haut, à gauche de la dalle. A sa taille, il porte probablement une ceinture à laquelle sont rattachés deux fourreaux :  celui qui contient son poignard à gauche et celui qui contient son épée à droite. Ses pieds portent des éperons.

A côte de Loys, se tient Dame Marie de Brichanteau , ses armoiries sont figurées en haut à droite de la dalle. Elle est représentée vêtue d’une longue robe, recouverte d’un manteau et la tête pieusement recouverte d’un voile. Elle porte un chapelet à la taille qui descend jusqu’à ses genoux.

Les deux personnages ont les mains jointes en prière.

Les personnages sont représentés sous une voûte avec des colonnes à chapiteau ionique, en forme de cornes de béliers enroulées, typiques de l’Antiquité grecque. Au-dessus de ces colonnes, un frontispice finement sculpté de volutes végétalisées au centre duquel trône un ange. Les colonnes sont également ornées d’anges. Ce décor se présente comme une porte d’entrée vers le Cieux, vers le Paradis alors qu’aux pieds de Loys de Billy on trouve la vie terrestre, notamment un lionceau à tête de dragon piétiné par le Seigneur. Ce lionceau représente le Mal, on peut y voir une illustration du Psaume 9.13 de l’Évangile au vers 13 : « Tu marcheras sur le lion et sur l’aspic, Tu fouleras le lionceau et le dragon »

Par ailleurs, plusieurs enluminures du Moyen-Age représente le Christ marchant sur un dragon à corps de lion et sur un serpent (un aspic).

 

Les armoiries gravées sont celles des deux familles 

 

En haut à gauche : Armoiries de la famille de Billy/de Vieuxpont

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Vairé d’or et d’azur, blason de la famille de Billy

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Or à une croix d’Azur, blason de la Seigneurie d’Yvor (Oise), fief hérité par Perceval de Billy, père de Loys au XVème siècle

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D’argent à 10 annelets de gueules, blason de la famille de Vieuxpont, mère de Loys – Armoiries de la ville de Courville

 

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Armoiries de Loys de Billy

 

En haut, à droite : Armoiries de Marie de Brichanteau épouse de Billy

 

 

 

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Vairé d’or et d’azur, blasonde la famille de Billy

 

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D’azur à six besoins d’argent , blason des Brichanteau

 

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D’argent à 10 annelets de gueules, blason de la famille de Vieuxpont, mère de Loys – Armoiries de la ville de Courville

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Armoiries de Marie de Brichanteau

L’épitaphe

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En haut et à gauche, la dalle de l’épitaphe est brisée, il manque les premiers mots du texte gravé…on peut toutefois supposer qu’il s’agit du mot « ci-gît » :

Ci-gît haute et puissante dame Madame Marie de Brichanteau en son vivant Dame de Vertron Montanglaust et Coubertin et femme et épouse de haut et puissant Seigneur messire Loys de Billy, chevalier, Baron de Prunay et Crossay, laquelle trépassa le 8ème jour de mai 1549. Priez pour son âme.

 *Vertron, Montanglaust et Coubertin sont des fiefs de la famille Brichanteau situés dans l’Yonne (Vertron) et la Seine-et-Marne, vers Coulommiers (Montanglaust et Coubertin)

La dalle comme l’épitaphe qui l’accompagne sont classées au titre d’objet depuis le 07/11/1906.

État avant restauration

La dalle est brisée en quatre fragments principaux à cause d’un accident en 1876 lors du dépavage de la nef, selon la notice de la Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine. Des fragments perdus ont été restitués en mortier à base de plâtre. Outre les cassures anciennes, la dalle est très abîmée par des déplaquages d’environ 1 à 2 millimètres d’épaisseur principalement sur le pourtour du grand fragment inférieur, seule sa zone centrale étant à peu près préservée. L’épiderme déplaqué tombe et découvre les efflorescences de sels solubles responsables de cette altération.

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La restauration

En collaboration avec la DRAC, l’étude pour la restauration de la dalle a été initiée en 2010. Jackie Ferré, maire en 2012, commanda la restauration auprès d’Olivier ROLLAND, restaurateur de sculptures à Montlouis (37).

La restauration a nécessité un traitement de dessalement par bains exceptionnellement long : l’œuvre déposée le 2 avril 2012 est restée en bains de mai 2012 à mars 2020 et a été reposée le 17 février 2021

Traitement

Les sels de toutes sortes et de toutes natures constituent l’un des pires ennemis du patrimoine bâti. Leur extraction du matériau dans lequel l’humidité, autre fléau de la construction, les invite à revenir, est une tâche longue et complexe.

Le bain de dessalement est la solution la plus radicale mais aussi plus pérenne, elle consiste à imprégner la pierre à cœur en la mettant à tremper dans des bacs d’eau régulièrement renouvelés jusqu’à ce que les sels aient disparu dans leur totalité.

Pour assurer la conservation de la dalle funéraire, il a donc fallu d’abord la dessaler par bain afin d’éliminer les sels. Il a fallu ensuite assurer l’adhérence des déplaquages à la pierre sous-jacente

Dès le 2 avril 2012, les déplaquages pouvant tomber sont fixés provisoirement par un « facing » de papier japon et gel d’hydroxypropylcellulose dans l’éthanol.  Après des tests d’innocuité sur de petits fragments pendant près d’un mois pour s’assurer que la pierre supporte bien l’eau, les fragments de la pierre tombale sont placés dans un bac noir. Ce bac est progressivement rempli d’environ 650 litres d’eau déminéralisée saturée en carbonate de calcium. Le bac est ensuite occulté par couvercle noir afin d’éviter les développements d’algues vertes et de limiter l’évaporation. Le bain est agité par six pompes d’aquarium faisant circuler l’eau de la face supérieure à la face inférieure et la faisant tourner tout autour de la dalle. Le premier et le second bain ont duré 3 ans, le troisième, 1 an. 

dalle dans son bainsorie du bain

A la fin du dernier bain, le plus grand fragment est pesé sous l’eau puis juste sorti de l’eau après avoir été essuyé ; il est encore pesé après séchage complet, ce qui permet de calculer la porosité avec une bonne précision. 

Un coulis de micro-mortier, teinté de pigments en poudre terre de Sienne naturelle et terre d’Ombre naturelle, est infiltré à la seringue et cathéter sous tous les soulèvements repérés. 

Des bouchages structuraux sont réalisés en gros gravier de tuffeau concassé (8 à 30 mm) enduit de résine pour former un béton époxyde aéré un peu moins dur que la pierre mais avec des propriétés mécaniques et de dilatation thermique et hydrique compatibles.

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Retour de la dalle

La dalle est revenue le 17 février dernier à Prunay après un long bain de dessalement de 8 ans !

Afin de la préserver de l’humidité et du vent, la dalle a été installée non plus dans le hall mais dans l’église (sur le mur de gauche, en entrant dans l’église) accompagnée de son épitaphe. 

 

Retour de la dalle le 17 février en présence de Jackie Ferré (à gauche), Maire à l’initiative de la demande de restauration en 2012 et de Nicolas Vanneau (à droite), Maire actuel.

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